150 ans et pas une ride !
150 ans et pas une ride !
C’est en général ce que l’on dit, par courtoisie, lorsqu’on croise une vieille dame. Mais en cette année si particulière, nulle formule de politesse n’est nécessaire : la station de la Société Nationale de Sauvetage en Mer de l’Aber-Wrac’h souffle fièrement ses 150 bougies ! Pas une ride, beaucoup d’entrain, et toujours cette étincelle de courage dans le regard de celles et ceux qui en portent l’uniforme.
Malgré les drames, malgré les tempêtes, malgré les absences parfois trop longues, la flamme ne s’est jamais éteinte. S’il est un village qui a su conjuguer la bravoure et la douleur, c’est bien ce petit port du nord-Finistère, blotti entre les courants et les vents, là où la mer impose sa loi mais où les hommes et les femmes lui tiennent tête avec dignité.
Depuis 1867 et la mise à l’eau du canot Thomassin, premier canot de sauvetage de la station, des générations entières de marins se sont relayées, unies par une même devise : "Courage et Dévouement".
Pour les familles restées à terre, une autre devise s’impose, plus silencieuse mais tout aussi forte : "Attente et Inquiétude ". Car chaque sortie en mer est une épreuve, un combat contre l’imprévisible.
L’ancien président de la station, André Tréguer, a trouvé les mots justes pour résumer l’esprit de ces sauveteurs : "Nous sortons en mer lorsque les autres rentrent. "
Une phrase simple, presque anodine, mais qui dit tout.
Ces hommes et ces femmes ne se prennent pas pour des héros. L’évocation du mot les fait sourire, eux qui connaissent trop bien la fragilité de la vie en mer. Leur humilité égale leur courage, et leurs gestes – répétés des centaines de fois – ont permis de sauver tant de vies qu’aucun registre ne saurait en restituer toute la portée humaine.
Hier, sous un soleil de plomb et une mer apaisée, le village tout entier s’est rassemblé sur les bords de l’Aber-Wrac’h. Les quais bruissaient d’une émotion contenue : anciens sauveteurs, familles, habitants, visiteurs, tous venus saluer un siècle et demi d’engagement.
Des équipages venus de Roscoff, Molène, Porspoder, Batz, Ouessant et d’ailleurs avaient répondu présents. Une belle fraternité maritime, soudée par le même serment : celui de ne jamais abandonner un homme en mer.
Ce jour-là, la mer semblait complice, douce et bienveillante, comme si elle voulait, elle aussi, rendre hommage à ceux qui la défient sans jamais la mépriser.
La fête, organisée avec passion par les bénévoles de la station, restera longtemps gravée dans les mémoires. Les fanions claquaient au vent, les uniformes brillaient, les enfants riaient. Et l’astre solaire, témoin privilégié, n’a pas boudé son plaisir de baigner cette belle journée de lumière dorée.
Parade, bénédiction des canots, démonstrations de sauvetage, danses bretonnes, chants marins, feu d’artifice...Tous les ingrédients étaient réunis pour faire de cet anniversaire une célébration à la hauteur de l’histoire.
Une journée d’émotion et de gratitude, tournée autant vers le passé que vers l’avenir, avec l’espoir que la mer, désormais, garde ses caprices sans réclamer de tribut. Que cette fête en appelle d’autres, et qu’à l’Aber-Wrac’h et ailleurs, "l’eau salée n’ait plus jamais le goût des larmes".


